Mutabilité urbaine
LA MUTABILITE DES TERRITOIRES URBAINS
A L’EPREUVE DE LA DURABILITE
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Les orientations fondamentales pour l’aménagement de l’Île-de-France précisent que les espaces urbanisés sont principalement dédiés à l’accueil des constructions destinées à l’habitation, aux services et équipements, aux bureaux, commerces, artisanats et industries… et comprennent des espaces ouverts urbains (espaces publics, espaces verts, espaces de loisirs) qui participent à la qualité urbaine.
Ces espaces comprennent des emprises mutables importantes ou des secteurs disposant d’un fort potentiel de valorisation, qui relèvent des secteurs de densification préférentielle.
LA MUTABILITE DES ESPACES FONCIERS
Le concept de mutabilité c’est quoi ? S’agit-il de la définition préconisée par Michel Pajon sur la ZAC dite du « Clos aux Biches » ? Autrement dit, prépare t-on la pelouse en élaborant une politique de la « table rase » à grands coups de bulldozer, afin de ne pas dissuader les promoteurs immobiliers ?
Les espaces urbains s’inscrivent depuis les années 1970, dans un contexte de profondes transformations territoriales, caractérisées par la formation d’espaces de plus en plus étalés dans les couronnes urbaines périphériques. Parallèlement, cette période marquant la fin des « Trente Glorieuses », annonce une phase de désindustrialisation majeure, remettant en question les systèmes de production, et l’organisation socio-économique des villes. De ces bouleversements structurels majeurs, découle la profusion d’espaces délaissés, sous-utilisés ou abandonnés.
L’affirmation de la notion de « mutabilité urbaine » est plus récente, puisque initiée par l’Etablissement Foncier Public du Nord-Pas-de-Calais, à la fin des années 1990, Elle vise à maximiser la gestion foncière des espaces urbains du Nord de la France profondément marquée par la profusion des friches industrielles potentiellement mutables, à court ou moyen terme. La « ville renouvelée » s’inscrit donc dans la problématique plus générale visant à valoriser la reconstruction de la ville sur la ville.
Aujourd’hui, les termes de « mutabilité urbaine », de « ville renouvelée », ou de « renouvellement urbain » découlent directement de principes opérationnels développés par nos technocrates de l’aménagement urbain et repris ensuite par les acteurs politiques comme le rappelle la Loi Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU) du 13 décembre 2000, mais en ayant totalement oublié l’origine nordique du concept de mutabilité. Voila comment en ce moment ce terme est dévoyé dans son esprit et utilisé à toutes les « sauces ». Si nous ni prenons pas garde, et le choix d’aménagement de l’Île-de-France en est une parfaite illustration, le danger est maximun, face aux Maires bâtisseurs inconditionnels. Nous en connaissons !!!....
ET LE S.D.R.I.F DANS CETTE HISTOIRE ?
Paragraphe 3.3, sur les orientations fondamentales pour l’aménagement de l’Île-de-France, nous lisons page 183 : « les espaces urbanisés comprennent des emprises mutables importantes ou des secteurs disposant d’un fort potentiel de valorisation… Sont concernés des quartiers de gare d’interconnexion, des secteurs d’habitats, des friches, etc… Les prévisions et décisions d’urbanismes doivent favoriser de plus grandes densités dans les quartiers définis par un rayon de 1000 m autour d’une gare ferroviaire ou une station de métro. »
Ceci étant, l’ADIHBH-V, tout en partageant l’idée selon laquelle l’étalement urbain doit être maîtrisé, et en affirmant son attachement à une augmentation raisonnée de la surface construite de notre territoire, considère néanmoins que la densification prônée par le SDRIF n’est envisageable que sur des terrains actuellement non construits, en friches (terrains libérés par l’Etat, usines désaffectées, SNCF, casernes, emprises d’autoroutes abandonnées,…), ou sur des terrains construits avec un bâti de mauvaise qualité. Cependant, si une densification de ces zones centrales desservies par des transports collectifs est nécessaire, il faut aussi que ces derniers ne pas soient saturés aux heures de pointe, comme nous le constatons malheureusement régulièrement sur la ligne A du RER.
Enfin, le SDRIF précise page 149, que de tels quartiers ne peuvent muter à l’horizon 2030 que vers un niveau de 87 logements / ha, valeur de référence pour des secteurs de densification préférentielle. Un niveau d’urbanisation supérieur ne pourrait se réaliser autrement que par des opérations globales de démolition-reconstruction auxquelles s’opposeraient à juste titre les habitants en place. En effet, à Noisy-le-Grand sur le Clos aux Biches, Michel Pajon vient d’en faire la triste expérience, avec une densification prévisionnelle de 175 logements / ha !!!...
Pour cette raison, l’ADIHBH-V demandera au SDRIF de préciser de façon claire les caractéristiques des terrains où une densification pourrait être envisagée et de définir également dans le texte la notion de « terrain mutable », ceci afin d’obtenir que la densification ne se fasse pas au détriment de la diversité de l’habitat, mais bien dans un esprit de préservation des zones d’habitat individuel, quand ces zones sont des quartiers pavillonnaires de bonne qualité, et favorisent la mise en valeur de la richesse des paysages urbains.
En ce qui concerne les déplacements et les transports, compte tenu du fait que l’accroissement de la population en Ile-de-France s’est accompagné d’un étalement continu de la ville et que les Franciliens se sont mis à habiter et à travailler de plus en plus loin, les flux de banlieue à banlieue représentent aujourd’hui 70% des déplacements quotidiens. Ces flux n’ont cessé de croître : plus 51% (source RATP) entre 1976 et 2001. A contrario, sur la même période, le volume des déplacements collectifs a connu seulement une augmentation très modeste de 15%.
Devant cet état de fait, un ambitieux programme de transport collectif sur l’axe Est – Ouest serait nécessaire puisque sa réalisation conditionnerait le bon déroulement des opérations à réaliser dans les futurs secteurs d’urbanisation et de densification, comme le secteur 4 de Marne la Vallée par exemple. Toutefois, l’ADIHBH-V exprime son scepticisme sur les possibilités pour la Région de faire réaliser un tel programme, sans recourir à d’autres modes de financement qu’actuellement.
Aussi, est-il raisonnable aujourd’hui pour nos politiques responsables, de se lancer dans des opérations d’urbanisation et de densification annoncées dans le SDRIF, sans que les transports collectifs prévus en accompagnement ne se réalisent préalablement ? Ceci ne fera que dégrader davantage la qualité de vie des Franciliens et provoquer de leur part des réactions hostiles aux politiques qui auront pris ces décisions. Néanmoins, à leur décharge, mentionnons honnêtement que l’équation à résoudre est complexe !
ET DEMAIN, NOISY LE GRAND ?
Concernant les secteurs d’urbanisation préférentielle, le SDRIF exprime sur la carte ci-dessous, mais sans obligation, une capacité maximun d’urbanisation que les collectivités peuvent choisir. Chaque pastille rouge indique un potentiel de 25 ha en moyenne.
Sachant que nous relevons à Noisy le Grand 7 emplacements, soit 175 ha de zone préférentielle, c’est 13% de la superficie de la ville qui est impliquée. Sachant que sur les 9,3 ha de la ZAC du Clos aux Biches, Michel Pajon voulait entasser 1500 logements, et que sur les 6 ha de la ZAD du Clos d’Ambert, il va construire 1200 logements, nous vous laissons le soin de faire le calcul sur 175 ha !!!...
Manifestement, à ce moment là, nos politiques d’opposition ne se battront plus pour savoir si Noisy-le-Grand, à l’horizon 2015 fera 75 ou 100 000 habitants. Quoi qu’il en soit, les Elections Municipales approchent, et l’ADIHBH-V souhaite que ce débat sur la densification et la mutation des espaces fonciers s’invite aux débats. Ce sera l’occasion pour les Noiséens de choisir le modèle de ville compacte qu’ils souhaitent, quelle sera demain leur place dans les limites d’une agglomération durable.
Agglomération durable, ville mutable, toutes ces notions se recoupent par le fait qu’elles s’inscrivent dans l’urbanisation d’une ville économe en espace, mais aussi sur une démarche qui reposerait sur la mise en œuvre de multiples concepts novateurs tant au niveau du processus de densification urbaine qui permettrait une insertion harmonieuse d’un projet dans son environnement immédiat, du choix intégré des procédés et produits de construction permettant la gestion des énergies autour d’une démarche de Haute Qualité Environnementale (HQE), de la gestion de l’eau et du confort acoustique, de l’encouragement des synergies fonctionnelles, etc,….
Hormis l’utilisation de quelques leitmotivs communicationnels sur les principes incontournables de la Loi SRU du 13 décembre 2000, afin de juguler les recours contentieux, le Plan Local d’Urbanisme (PLU) de Noisy le Grand adopté le 26 juillet 2007, n’est pas très explicite sur ces potentiels d’innovation pour l’évolution de l’environnement construit. Il manifesterait plutôt une ignorance coupable entre « ville mutable » et « ville durable », puisque le lien entre mutabilité et durabilité est quasi inexistant. Ce ne serait en aucun cas, une méthodologie d’action affirmée par les élus pour la valorisation et la requalification urbaine de la ville de Noisy-le-Grand. Ce ne serait pas la ligne directrice, ou cela restera à démontrer ?
En conclusion, bien avant les prochaines échéances, nous vous demandons de ne pas oublier de participer à l’Enquête Publique sur le SDRIF qui se tient jusqu’au 08 décembre 2007. Soit en rédigeant votre contribution sur le registre des observations qui se trouve dans les locaux de la Direction de l’Urbanisme, à Noisy le Grand, ou en écrivant à Monsieur le Président de la Commission d’Enquête, Conseil Régional d’Ile de France, 35 boulevard des Invalides, 75007 Paris.
Attention, nos observations porteront uniquement sur l’aménagement du Schéma Directeur de la Région Ile de France, et non sur la politique d’urbanisation de la ville de Noisy le Grand.
Alain Cassé
Président de l’ADIHBH-V
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