M Pajon c/ A Cassé, la Cour de Cassation ‘casse’ le jugement de Rouen !
JUSTICE
A NOISY-LE-GRAND:
Michel PAJON
c / Alain CASSE ,
LA COUR DE CASSATION INFIRME LE JUGEMENT
DE ROUEN
(photo-montage)
Le 30 octobre 2012, la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation, a annulé en toutes ses dispositions, l’arrêt de la Cour d’Appel de Rouen en date du 10 novembre 2010, qui avait considéré Alain Cassé comme l’auteur d’un message litigieux, dès lors qu’il assumait aux yeux des internautes et des tiers la qualité de producteur du blog « noisy-les-bas-heurts.com ». La Cour de Cassation renvoie la cause et les parties devant la Cour d’Appel de Versailles, afin de se prononcer sur le fond de l’affaire.
Rappel des faits, c’est une longue odyssée…..
- Le 7 février 2007, M. Michel Pajon, Député-maire de Noisy-le-Grand, a fait citer directement devant le tribunal correctionnel de Paris M. Alain Cassé, Président de l’Association de Défense des Intérêts des Habitants des Bas-Heurts-La Varenne (ADIHBH-V), « du chef de diffamation publique envers un citoyen chargé d’un mandat public », en raison de la publication, sur le site http://www.noisy-les-bas-heurts.com de cette Association.
- Par jugement du 14 mars 2008, la 17e Chambre de la presse du TGI de Paris, a renvoyé M. Alain Cassé des fins de la poursuite et débouté Michel Pajon de ses demandes.
- Par arrêt du 28 janvier 2009, en appel, la 11e Chambre de la Cour d’Appel de Paris, a confirmé le jugement ayant débouté Michel Pajon de ses demandes, en retenant que M. Alain Cassé n’était pas un professionnel de l’information et assurait à titre gratuit l’exploitation de ce service de communication en ligne ; que le site ne faisait pas l’objet d’une modération a priori des messages déposés par les internautes ; que la preuve de la fixation du message avant toute communication au public n’était pas rapportée par Michel Pajon ; que l’auteur du message incriminé n’avait pas été recherché ; que Michel Pajon n’avait pas demandé le retrait du commentaire de cet internaute ; que M. Alain Cassé n’avait pas la qualité d’hébergeur et que les conditions de son éventuelle complicité n’étaient pas réunies en l’espèce.
- Par arrêt du 16 février 2010, la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation a cassé cette décision et renvoyé la cause et les parties devant la Cour d’Appel de Rouen, en considérant que M. Alain Cassé, qui avait pris l’initiative de créer un service de communication au public par voie électronique en vue d’échanger des opinions sur des thèmes définis à l’avance, pouvait être poursuivi en qualité de “producteur”, sans pouvoir opposer un défaut de surveillance du message incriminé.
- Par arrêt du 10 novembre 2010, la Cour d’Appel de Rouen, infirmant le jugement de la 11e Chambre du TGI de Paris en sa partie déférée sur l’action civile, a dit établis à l’encontre de M. Alain Cassé les faits de diffamation publique envers un citoyen chargé d’un mandat public qui lui étaient reprochés, et l’a condamné à payer à M. Michel Pajon la somme de 2.000 euros à titre de dommages-intérêts. La Cour d’Appel a également ordonné la publication du jugement sur le site http://www.noisy-les-bas-heurts.com.
- Le 13 novembre 2010, M Alain Cassé déposait un Pourvoi en Cassation contre l’arrêt de la Chambre Correctionnelle de la Cour d’Appel de Rouen du 10 novembre 2010.
- Le 21 juin 2011, la Cour de Cassation envoyait au Conseil Constitutionnel une Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l’article 93-3 de la loi du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, en ce que cet article fait peser sur le producteur d’un service de communication en ligne, à défaut du directeur de la publication et de l’auteur du message, une présomption de culpabilité en le rendant responsable de plein droit du contenu des messages diffusés dans un espace de contributions personnelles dont il est l’animateur, même s’il en ignore le contenu .
- Le 16 septembre 2011, la décision du Conseil Constitutionnel (n° 2011-164 QPC), déclarait cet article conforme à la Constitution, sous réserve que les dispositions contestées ne sauraient, sans instaurer une présomption irréfragable(*) de responsabilité pénale en méconnaissance des exigences constitutionnelles précitées, être interprétées comme permettant que le créateur ou l’animateur d’un site de communication au public en ligne mettant à la disposition du public des messages adressés par des internautes, voie sa responsabilité pénale engagée en qualité de producteur à raison du seul contenu d’un message dont il n’avait pas connaissance avant sa mise en ligne.
Par cette réserve d’interprétation, le Conseil Constitutionnel a ainsi entendu infléchir la jurisprudence judiciaire qui considérait que, lorsqu’une infraction prévue par le chapitre IV de la loi du 29 juillet 1881 était commise par un moyen de communication au public par voie électronique, à défaut de l’auteur du message, le producteur devait être poursuivi comme auteur principal, même si le message n’avait pas été fixé préalablement à sa communication au public.
En conséquence, telles qu’interprétées par le Conseil Constitutionnel, les dispositions de l’article 93-3 de la loi du 29 juillet 1982 modifiée, n’autorisaient pas la Cour d’Appel de Rouen à entrer en voie de condamnation à l’encontre de M. Alain Cassé, en sa qualité de producteur du blog de l’Association ADIHBH-V, dès lors qu’il était établi qu’il n’avait pas eu connaissance du contenu du message incriminé avant sa mise en ligne.
- Le 30 octobre 2012, la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation, annule en toutes ses dispositions, l’arrêt de la Cour d’Appel de Rouen en date du 10 novembre 2010, qui avait considéré Alain Cassé comme l’auteur d’un message litigieux, dès lors qu’il assumait aux yeux des internautes et des tiers la qualité de producteur du blog http://www.noisy-les-bas-heurts.com.
En effet, en se déterminant ainsi, sans rechercher si, en qualité de producteur du blog, M Alain Cassé avait eu connaissance, préalablement à la mise en ligne du contenu du message litigieux ou que, dans le cas contraire, il s’était abstenu d’agir avec promptitude pour le retirer dès qu’il en avait en connaissance, la cour d’appel de Rouen n’a pas fait l’exacte application de l’article 93-3 de la loi du 29 juillet 1982 modifiée sur la communication audiovisuelle au regard de la réserve du Conseil Constitutionnel.
En conséquence, la Cour de Cassation renvoie la cause et les parties devant la Cour d’Appel de Versailles, afin de se prononcer sur le fond de l’affaire, dans 12 ou 18mois.
Alain Cassé, verra-t-il un jour le bout du tunnel ?
Ce roman juridique Michel Pajon c/ Alain Cassé-ADIHBH-V, dure maintenant depuis plus de 5 ans, c’est très long et onéreux, tant pour les contribuables Noiséens que pour l’ADIHBH-V.
En 2005, la création du blog citoyen local de l’ADIHBH-V avait simplement pour but de créer un espace de communication électronique dans le cadre de sa lutte citoyenne contre un projet urbain pharaonique sur le quartier des Bas-Heurts, à Noisy-le-Grand (93). Ainsi, la politique immobilière conduite par le Maire et son équipe municipale devait être contestée publiquement, débattue et dénoncée par l’Association. Certes, parfois dans un contexte qui pouvait être polémique, mais surement jamais avec une volonté affirmée d’être injurieuse ou diffamatoire. Mais toujours dans le cadre d’une controverse entre une Municipalité et une Association, à propos d’une politique immobilière pharaonique sur un quartier de la ville, avec « tabula rasa » à l’appui, conduite par le Maire et son équipe, qui pouvait tout naturellement trouver sa place dans un débat d’intérêt général, relevant de l’expression politique militante. D’ailleurs, une décision de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, en date du 25 mai 2010, va dans ce sens.
Il est manifeste, que cet outil de publication donne aux citoyens noiséens la possibilité de s’adresser librement et facilement à une audience de plus en plus grande. Aussi, le Web déstabilise les institutions en place et les élus, puisque c’est un média qu’ils ne contrôlent pas. En fait, ils ne supportent pas qu’un citoyen « normal » s’empare de ce qu’ils considèrent comme leur monopole dans leur délégation de pouvoir qui est devenu un métier; la parole publique. En d’autres termes, c’est toujours le même crédo : « votez pour moi tout les six ans, ensuite comme j’ai la légitimité électorale, je ne veux plus vous entendre ! »
Alors oui, cela courrouce les Ediles, et au moindre faux pas, le fruit est mûr pour cueillir l’agitateur qui était en observation depuis longtemps dans un cabinet d’avocat. D’où, vraisemblablement l’opportunité qui se présentait de donner « un coup sur le bec » d’Alain Cassé, afin de mettre au pas cet héréditaire Occitan à l’esprit frondeur, Président de l’ADIHBH-V, en le faisant citer directement devant le Tribunal Correctionnel de Paris, (17e Chambre de la presse) du chef de « diffamation publique », pour ce malheureux propos d’un internaute le mettant en cause, sur le blog http://www.noisy-les-bas-heurts.com.
Mais pour être exhaustif, il n’est pas inutile de rappeler dans cette histoire quelques circonstances atténuantes, telles que:
- ’ADIHBH-V n’a pas ouvert son blog en vue de permettre sciemment à des internautes d’écrire des commentaires diffamatoires à l’encontre du Maire de Noisy-le-Grand,
- ce n’est pas Alain Cassé qui est l’auteur du message litigieux,
- le blogueur, pourtant connu grâce à sa signature, n’a pas été recherché par Michel Pajon, et donc n’a pas été poursuivi par la partie civile,
- que Michel Pajon n’a pas demandé le retrait du commentaire incriminé, ce qui aurait été de bon goût et une forme élégante de manifester sa désapprobation,
- le site internet, à cette époque, ne faisait malheureusement pas l’objet d’une modération a priori, des messages déposés par les blogueurs,
- Alain Cassé n’est pas un professionnel de l’information et assure seulement à titre bénévole la Présidence de l’ADIHBH-V, dans le cadre de son ‘métier citoyen’.
Ceci étant, en tant que Démocrate, Alain Cassé respectera toutes les décisions de justice qui feront suite à cette affaire, bonnes ou mauvaises. Néanmoins, il ne peut pas totalement exclure que l’occasion était vraiment trop belle, et que c’était le moment de « se payer » ce trublion des Bas-Heurts. Comme il fallait « se payer » en d’autres lieux, d’autres blogueurs à Puteaux (92), à Orléans (45), au Raincy (93) ou à Noisy-le-Sec (93)……Serait-ce la nouvelle doctrine d’une gouvernance qui prône la démocratie représentative ?…
Enfin, si la Loi sur la liberté de la presse date du 29 juillet 1881, l’affaire qui emmouscaille la vie du Président de l’ADIHBH-V depuis plus de 5 ans, met enœuvre un moyen récent de communication par voie électronique. Juridiquement, c’est pour ce média une période d’apprentissage et Alain Cassé contribue largement à établir la jurisprudence judiciaire. C’est beaucoup d’honneur nous direz-vous, car il n’y a d’honneur que dans la résistance, mais c'est extrêmement violent et il faut en payer le prix !!!...
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(*) – Irréfragable : Que l’on ne peut contester. Synonyme : Irrécusable, indiscutable.