Y-a t-il un devoir d'intercommunalité à Noisy-le-Grand ?
Y-A T-IL UN DEVOIR
D’INTERCOMMUNALITE
A NOISY-LE-GRAND ?
Selon l’Institut d’Aménagement et d’Urbanisme (IAU-n°527, novembre 2010), le développement des intercommunalités à fiscalité propre a repris en Ile de France, pour atteindre 75% des communes au 1er janvier 2010. L’achèvement du processus en petite couronne est plus incertain.
La Seine Saint Denis compte seulement jusqu’à présent deux intercommunalités : Plaine Commune (350 000 habitants), qui regroupe huit villes au nord de Paris (Aubervilliers, Epinay-sur-Seine, La Courneuve, L’Ile Saint Denis, Pierrefitte-sur-Seine, Saint-Denis, Stains et Villetaneuse) et la Communauté de Commune de l’Aéroport du Bourget (60 000 habitants), qui regroupe trois villes (Drancy, Le Bourget et Dugny).
Mais la Seine-Saint-Denis avance, huit villes de l’Est de la Seine-Saint-Denis ayant quitté l’ACTEP, ont annoncé depuis plusieurs mois leur volonté de former la plus grande intercommunalité d’Ile-de-France avec près de 400 000 habitants (Bagnolet, Bondy, Les Lilas, Le Pré-Saint-Gervais, Montreuil, Noisy-le-Sec, Pantin et Romainville).
Et Noisy-le-Grand ? Et bien Noisy-le-Grand avance toujours en solitaire et reste hermétique aux sirènes de l’intercommunalité. Il faut dire que l’interprétation du Maire sur le sujet ne pousse pas à l’optimisme. Pour mémoire, rappelons sa définition déclamée en Conseil municipal :
« L’Intercommunalité, c’est simple, cela se résume à garder ce que l’on a, et à partager ce que l’on aura. Vous gardez toutes les richesses que vous avez et vous allez partager collectivement tout ce que vous aurez.
A Noisy-le-Grand, nous avons 550 000 m² de bureaux à construire et la richesse de la ville est là. Même si l’Etat nous à spolié une part importante de la taxe professionnelle, il reste tout de même une base taxable qui représente beaucoup d’argent. Donc, nous nous disons que si nous voulons nous marier, il vaut mieux se marier avec le plus petit autour de nous (par exemple :Gournay-sur-Marne), qu’avec le plus grand, afin que la situation financière de celui avec lequel on se marie, coûte le moins cher possible aux Noiséens. Nous n’avons pas intérêt à nous précipiter dans une opération d’Intercommunalité avant 2014, ou elle sera obligatoire »].
Ceci étant, en décortiquant la plaquette de présentation du nouveau PLU, l’effet d’annonce semblerait séduisant ? Nous lisons :
- Le PLU exprime la vision de l’évolution de la ville, il est un outil indispensable pour préparer l’avenir de la commune,
- Le PLU doit permettre à Noisy-le-Grand de trouver la place qui lui revient au niveau régional, il lui faut en effet préparer et organiser le futur.
Bigre, mais dans les faits, en l’absence d’intercommunalité, cela pourrait bien rester un effet d’annonce sans lendemain, car la vision affichée de la commune est tronquée, à un moment où le projet de loi sur la réforme des collectivités territoriales et intercommunales est en cours de discussion parlementaire, afin d’achever la couverture intercommunale du territoire avant le 1er juillet 2013.
Pour étayer nos objections, faisons appel à Philippe DALLIER [1]. Selon le Sénateur-Maire de Pavillon-sous-Bois, l’Intercommunalité à fiscalité propre s’est vue fixer par ses instigateurs un but essentiel ; celui de l’aménagement du territoire en vue du développement économique. En d’autres termes, les Etablissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI) sont des regroupements de communes ayant pour objet l'élaboration de projets communs de développement au sein de périmètres de solidarité. Son principe traditionnel reste celui de faire mieux ensemble, et à moindre coût pour le contribuable, ce que chaque commune ne peut faire seule.
Le territoire choisi des EPCI doit permettre une gestion viable du point de vue économique, c'est-à-dire que le territoire doit être de taille suffisante de manière à rentabiliser les investissements publics qui ont été faits.
Si nous suivons ce dessin, l’implantation d’un Centre Aquatique en plein centre ville, à Noisy-le-Grand, n’aurait jamais dû recueillir l’assentiment des élus. Avec une vision plus communautaire n’auraient-on pas pu construire cet équipement public sur Maille Horizon, comme déjà envisagée au moment du Centre Urbain Régional (CUR) en 1989, à coté demain du Lycée International, et surtout limitrophe de Bry-sur-Marne afin que les Bryards puissent en bénéficier. De ce fait, rentabiliser les investissements publics qui ont été faits, et diminuer la contribution fiscale des Noiséens, en reportant une partie de la charge sur la commune de Bry-sur-Marne, elle-même utilisatrice.
Poursuivons avec l’expertise des Ateliers LIONS-Groupe DESCARTES [2]. Certes, le langage utilisé est propre aux Architectes Urbanistes, mais l’analyse traduit encore une fois la volonté politique de réfléchir ensemble à un projet de mutualisation des moyens et des ambitions pour la constitution de grandes communautés urbaines, à savoir :
- Créer du local métropolitain :
L’élargissement et le renforcement des intercommunalités doit permettre une évolution de la gouvernance pour sortir d’une situation d’impuissance tant locale que
régionale. L’objectif premier de l’intercommunalité francilienne doit être de fabriquer du local dans la métropole, dans un double processus urbanistique et politique.
- Ne pas conduire à des intercommunalités opportunistes et sans projet.
Mal encadrée, la loi a donné lieu à bon nombre d’incongruités, c'est-à-dire que les intercommunalités défensives, non coordonnées et opportunistes se sont multipliées. En effet, 10% des communautés de la Région Ile-de-France rassemblent seulement deux communes (ndlr : Noisy-le-Grand, attention). Cette fragmentation produit des espaces sans vocation opérationnelle.
- Inciter à la constitution de grandes communautés urbaines.
La redéfinition des contours actuels des communes d’agglomérations trop petites est nécessaire. En Ile de France, il y a la place pour 20 à 30 « villes » de 300 00 à 600 000 habitants. Aussi, cette intercommunalité renouvelée devra répondre au défi de la construction de trames urbaines locales susceptibles de suturer et de dynamiser les territoires de la métropole. Elle aura à mobiliser des ressources variées : affinités politiques certes, mais aussi complémentarité socio-économique et communautés de projets.
- Systématiser les délégations de compétences.
Disposant de ressources opérationnelles, les élus de ces nouvelles entités pourront inscrire leurs initiatives dans de véritables projets locaux. Ils seront ainsi tenus plus facilement responsables de leurs actions ou de leur passivité. A conditions de systématiser les délégations de compétences, les intercommunalités seront les acteurs centraux sur les questions foncières et immobilières [plans d’urbanisme, programmes d’habitat, logement social, politique de la ville, plans de déplacements urbains (PDU),…..]
- Bousculer les hiérarchies.
Il n’est pas question de créer une juxtaposition d’intercommunalité sans interdépendances. A l’ère de la « ville mobile », les projets urbains locaux doivent trouver leur sens et leurs contours dans leur articulation aux autres villes plutôt qu’en eux-mêmes. Il faut par exemple s’immiscer dans les Plans Locaux d’Urbanisme (PLU) pour favoriser la mixité fonctionnelle. Selon l’ADIHBH-V, le Président de l’intercommunalité qui devrait disposer d’un leadership fort sur tout le territoire, pourrait être investi de cette mission ?
Après ces quelques réflexions succinctes, le Groupe DESCARTES conclut le chapitre en mentionnant que des intercommunalités fortes permettraient de faire émerger des acteurs politiques qui auront une vraie responsabilité territoriale et une vraie légitimité démocratique, en évitant l’oligarchie.
En rester au seul stade local, ce serait encourager les sirènes des séparatismes locaux, renforcer le risque de construire une région par collage et juxtaposition de territoires en concurrence, faisant le lit d’un éclatement territorial autour de structures locales quasi féodales.
Alors observons Noisy-le-Grand. A la lecture de ses quelques éléments, nous comprenons très bien que le PLU que l’on soumet aux habitants peut susciter de vives inquiétudes puisqu’il ne débouchera, à terme, que sur un polycentrisme communal. Dans ces conditions, sans saisir aujourd’hui l’opportunité du développement intercommunal, le risque est bien réel de voir Noisy-le-Grand rester au milieu du gué du développement économique dans les 15 prochaines années.
Si nos élus sont dans l’incapacité d’écrire aujourd’hui la partition de l’intercommunalité et d’entonner l’hymne métropolitain, Noisy-le-Grand sera victime demain compte tenu de la concurrence effrénée des pôles économiques, d’un émiettement dangereux.
C’est très bien d’être un gestionnaire rigoureux, mais Noisy-le-Grand qui dégage un excédent global sur l’exercice 2009 de 72 millions d’euros, a aussi besoin d’un visionnaire généreux. Il ne suffit pas d’être un chanteur à la voix puissante, faut-il encore qu’il chante juste le bon répertoire!
[1]- Philippe DALLIER, est chargé d’une étude sur l’intercommunalité par l’Observatoire Sénatorial de la décentralisation.
[2]- Consultation Internationale de Recherche et de Développement sur le Grand Paris et l’Agglomération Parisienne », 19 février 2009.
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