Le bouleversement juridique du Grand Paris
LE BOULEVERSEMENT JURIDIQUE
DU « GRAND PARIS »
Après l’adoption du tracé du « super-métro », la loi du 3 juin 2010 entre dans sa deuxième phase la plus importante. Au cœur de ce dispositif : le Contrat de Développement Territorial (CDT) [1].
Les communes et les Etablissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI) ont été sollicités par le Préfet d’Ile-de-France. Quatre CDT sont en cours d’élaboration dans l’Est Parisien, dont celui de Noisy-le-Grand/Champs-sur-Marne.
Mais un CDT ne se limitera pas aux communes qui accueilleront une nouvelle gare. Il s’étendra aussi sur des territoires bien plus vastes. Neuf territoires de projets ou « clusters » ont ainsi été définis en 2010 par la mission du Grand Paris, dont le cluster de « la Cité Descartes », à cheval sur Champs-sur-Marne et Noisy-le-Grand. (cliquer sur : http://www.mon-grandparis.fr/les-territoires-du-projet), qui sera aménagé par les Ateliers LIONS (Architecte du Grand Paris). Le CDT est donc d’essence intercommunale ; les interlocuteurs seront le Préfet de Département pour négocier leur existence, et le Préfet de Région pour négocier le contrat.
Les CDT seront soumis à une Enquête Publique Environnementale d’un mois (L.123-7C), dans un délais de 18 mois à compter de la publication des décrets portant approbation du schéma d’ensemble arrêté le 26 mai dernier.
Le MONITEUR du 22 août 2011, au chapitre Réglementation, nous informe :
1- Que le Contrat de Développement Territorial innove sur trois points :
- Le partage Etat-Société du Grand Paris/Collectivités, du droit de préemption et d’expropriation dans les Zones d’Aménagement Différé (ZAD). D’aucuns souligneront la forte incitation qui pèse sur les communes pour signer un CDT, car son absence leur ferait courir le risque de voir la Société du Grand Paris conduire seule, sous certaines conditions, des opérations d’aménagement sur leur territoire, dans un rayon de 400 m autour des gares.
- La mise en compatibilité « traversante » de tous les documents d’urbanisme locaux avec le CDT sur la zone concernée. Ce mouvement de mise en cohérence des documents d’urbanisme locaux sous le contrôle à posteriori de l’Etat, était déjà engagé par la Loi « Grenelle 2 » du 12 juillet 2010. Cette évolution intégrationniste du droit de l’urbanisme est encore renforcée par la deuxième innovation importante du CDT. Ainsi, ce dernier peut valoir déclaration de projet (Art.21-IV LGP), ce qui donne la possibilité de recourir aux procédures de mise en compatibilité abrégées du PLU si, du moins, le CDT ne porte pas atteinte à l’économie générale de ces documents locaux. Cette réserve sera sans doute la source de contentieux.
- Le caractère très prescriptif du contenu d’un CDT qui s’impose à des Contrats d’Aménagement que la loi crée également et dont la mise en place pourrait, de ce fait, s’avérer délicate.
2- Que le Préfet de Région influera sur tous les documents locaux, alors qu’il dispose également d’importantes prérogatives au sein de la Société du Grand Paris. Pour autant, seuls les communes et les EPCI disposent du pouvoir de conclure un Contrat d’Aménagement, qui est l’un des moyens de mise en œuvre des CDT.
3- Les CDT précisent le nombre de logements (en particulier le pourcentage de logements sociaux), dressent la liste des ZAD (Ex : aujourd’hui, le secteur de Maille Horizon est une ZAD - Epamarne), avec les bénéficiaires des droits de préemption. Présentent un calendrier prévisionnel des opérations d’aménagement et vont jusqu’à fixer les conditions générales de financement et le bilan prévisionnel des opérations d’aménagement avec les dépenses d’acquisitions et les dépenses de travaux. Il détermine notamment les financements des biens publics propres aux opérations dus par les aménageurs et les constructeurs. Vu le cahier des charges très complet, on peut s’interroger sur la viabilité des engagements souscrits, notamment financiers, en cas de délégation, puisque l’aménageur délégué ne participe pas ab initio (depuis le début) à la négociation de ces ambitieux contrats. La négociation ne se déroule qu’entre le Préfet et les Communes.
Commentaire
Il est indéniable que le « Grand Paris » doit pouvoir booster le développement économique de Noisy-le-Grand. Nous pouvons le souhaiter, mais…. Aujourd’hui, il est vraisemblable qu’un Contrat de Développement Territorial s’élabore entre l’Etat-Noisy-le-Grand et Champs-sur-Marne. Mais il ne serait pas étonnant que des différences d’appréciation surgissent car les objectifs urbains de ces deux Communes divergent. D’un côté, Champs-sur-Marne (PCF) réclame en premier lieu des emplois, et dans l’affirmative construira des logements. De l’autre, Noisy-le-Grand (PS), avec à sa tête un Maire bâtisseur débordant d’imagination, veut construire 7700 logements d’ici 2013, et ensuite il espère des emplois qui arriveront au compte goutte, ou n’arriveront pas, si nous avons encore une aggravation de la crise financière mondiale!
Il est évident que ce CDT intégrera tous les projets énoncés dans le PADD de décembre 2010, sur le territoire Communal. Il ne se limitera pas seulement au secteur de la gare du super-métro automatique de Noisy-Champs, impacté par le Cluster de la Cité Descartes. Pour le Maire, c’est du pain béni, il ne peut laisser passer l’opportunité de mettre toutes ses ambitions dans la ‘marmite’ du CDT, au nom, comme toujours, d’un quelconque Intérêt Général. S’agissant d’un dispositif de dimension nationale, aujourd’hui l’Etat, au travers du Préfet d’Ile-de-France devient tout naturellement le bras armé de Michel Pajon, afin qu’il puisse assouvir ses ambitions.
Ce Contrat de Développement Territorial sera une arme redoutable contre les Noiséens. Sa mise en compatibilité « traversante » remet en cause le principe de compatilibité hiérarchiquement limitée, qui permettait de limiter l’exigence de compatibilité d’un document d’urbanisme à celui qui lui est immédiatement supérieur (Ex : le SDRIF, par rapport au PLU). Ainsi, comme le contenu du CDT est prescriptif et du fait de cette compatibilité obligatoire, nous pouvons prévoir d’âpres négociations à venir entre les édiles et le Préfet. Fort de son opiniâtreté, il est certain que Michel Pajon va encore poursuivre son harcèlement sur l’Etat, afin de sortir du jouc d’Epamarne qu’il juge inopérant sur la commune, et racheter les terrains de Maille Horizon pour aménager ce secteur à sa guise, dans son projet Grand Ouest.
D’ici la fin de l’année, la situation devrait évoluer, et nous pouvons compter sur la communication du Maire, pour nous annoncer solennellement sa « prise de guerre », dans une déclaration liminaire lors d’un prochain Conseil Municipal, et ensuite dans Noisy Magazine.
Pour autant, ce CDT sera soumis à une nouvelle Enquête Publique Environnementale d’un mois. A cette occasion, les Noiséens devront être obligatoirement les acteurs incontournables de cette nouvelle politique d’aménagement. Ne laissons pas les oligarchies imposer aux habitants de Noisy-le-Grand une mise sous tutelle et une mise en congé définitive de la démocratie, au seul bénéfice des financiers, en broyant de l’humain.
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Contribution bibliographique :
- LE MONITEUR du 22 août 2011 – Renaud GOURVES, avocat au Barreau de Paris,
- [1] - Présentation du CDT- Secrétariat d’Etat à la Région Capitale.
Textes de références :
- Loi relative au « Grand Paris », LGP du 3 juin 2010 - LE MONITEUR du 11 juin 2010,
- Décret du 24 juin 2011- LE MONITEUR du 22 août 2011.
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Dernière minute : En plein dans la cible !!!...
NOISY-LE-GRAND : Un Palais néo-antique en sursis.
Voir GEO du mercredi 2 novembre 2011. Valerio Vincenzo et Christelle Pancrazzi.
Conçu en 1983 par l’architecte Ricardo BOFFIL, le Palacio d’Abraxas est menacé de démolition afin de céder la place à un Eco-Quartier. Les habitants ne l’entendent pas de cette oreille et ont formé un collectif pour sa réhabilitation.