DÈS 2007, UNE ALTERNATIVE SÉRIEUSE EXISTAIT SUR LES BAS-HEURTS
ET SI LES ÉTUDIANTS DE L’ENSAPLV* ET L’ADIHBH-V AVAIENT EU RAISON AVANT L’HEURE ?
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Noisy-le-Grand bouge, Noisy-le-Grand avance rapidement, trop rapidement diront parfois certains, avec des dossiers mal ficelés qui nous valent quelques mésaventures financières, mais bon, Noisy-le-Grand est sous contrôle....dira l’Édile…
Le premier magistrat est un homme pressé, nous n’en voulons pour preuve que la ribambelle d’appels à marchés publiés au Bulletin Officiel des Annonces des Marchés Publics (BOAMP) chaque mois. Evidemment, et ce n’est pas faire injure à nos amis, mais l’ADIHBH-V porte une attention toute particulière aux projets de l’Ouest Noiséen.
Nous trouvons :
-le 18 juillet 2011 : Réalisation d'études pré-opérationnelles pour l'aménagement du secteur dit du Clos aux Biches et réalisation des dossiers de création de la ZAC et de DUP à Noisy-le-Grand [1].
- le 07 décembre 2011 : Marché de maîtrise d'œuvre pour l'aménagement des espaces publics et les travaux de VRD (Voirie et Réseaux Divers) du secteur Maille Horizon Nord.
L’examen attentif des Cahiers des Clauses Particulières (CCP) de ces deux appels d’offres, nous permet de constater aujourd’hui une évolution significative et positive dans l’approche de l’aménagement de ces quartiers. Il s’agit là vraisemblablement, de l’impact bénéfique d’un nouveau directeur de l’urbanisme et de l’aménagement de la ville, un homme de l’art, architecte de son état.
Alors qu’en 2007, la première enquête publique sur la ZAC du Clos aux Biches était l’expression d’un nouveau quartier qui, après avoir rasé les Bas Heurts pourrait être nulle part et n’importe où, posé au milieu de n’importe quoi. Aujourd’hui nous détectons la prise en compte d’un « périmètre d’étude élargi », prenant notamment en considération le Grand Projet Ouest : les Mailles Horizon, le lycée et le collège internationaux, la coulée verte, la restructuration du quartier de La Varenne et le schéma d’aménagement des Bords de Marne.
A cette occasion, les études porteront dans un premier temps sur un « périmètre élargi » des abords des quartiers, c'est-à-dire :
- Les liaisons existantes ou à créer afin de renforcer les continuités vers les autres quartiers de la ville, vers les commerces et équipements, vers les bords de Marne, les zones de loisirs ou les polarités de transports.
- Les autres secteurs de projets notamment les Mailles Horizon, la Rive Charmante et le centre ville
- Les principes généraux d’organisation de la desserte des îlots par la rue Pierre Brossolette, l’avenue Montaigne et le boulevard du Mont d’Est…
Ensuite nous trouverons dans un deuxième temps des études sur le « périmètre opérationnel restreint » du Clos aux Biches, dans le cadre d’un Eco-Quartier. Ici, il conviendra d’insérer ce nouveau projet dans son environnement immédiat. La composition du plan masse et le travail de mise en volume devra prendre en compte la dimension des îlots, le gabarit des voies et la nature du tissus urbain contigu pour proposer un épannelage [2] des hauteurs et un équilibre bâti / espace libre (privé ou public) adapté au site, et tout particulièrement en tenant compte des limites communales avec le quartier pavillonnaire limitrophe de Bry-sur-Marne.
Pour mémoire, un rappel historique s’impose maintenant.
Dans le courant de l’année 2006, afin de préparer l’enquête publique sur la ZAC du Clos aux Biches, l’ADIHBH-V s’est mobilisée contre le projet de la mairie de Noisy-le-Grand de raser purement et simplement le quartier des Bas-Heurts, après en avoir expulsé ses habitants. Ainsi, une étude alternative a été réalisée par les étudiants de 4ème année de l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Paris La Villette (ENSAPLV).
L’objectif de ce projet alternatif, consistait donc à étudier les conditions d’une transformation interne du quartier des Bas Heurts par une densification progressive et maîtrisée, à partir des dispositifs urbains existants. Pour y parvenir, il a fallu en avoir analysé avec soin les origines, l’évolution, les structures physiques mais également avoir rendu compte de sa réalité sociale et humaine dans toute son épaisseur. Ce préalable absolu, auquel on ne saurait échapper lorsque l’on se propose de transformer profondément un quartier habité, n’avait même pas été effleuré par les responsables municipaux. L’étude d’impact ne comportait sur ce point aucune analyse sérieuse, aucune mention des conséquences sociales du projet soumis à la procédure d’enquête publique. Et pour cause, la méthode utilisée, celle de la « tabula rasa » (on rase tout), avait précisément pour fondement l’éradication de toutes traces d’une occupation antérieure du site, une négation de son histoire, du passé de ses habitants. Elle devait par définition, ignorer le contexte, au sens large du terme, dans lequel elle se déployait. Le résultat de la démarche municipale sur le quartier des Bas-Heurts à Noisy-le-Grand relevait de la caricature.
C’est entre autres, le caractère outrancier de ce projet qui a conduit les enseignants de l’ENSAPLV qui ont encadré ce travail, à proposer à leurs étudiants de lui opposer un projet alternatif rigoureux et convaincant.
Il était clair que les présupposés à partir desquels les étudiants ont élaboré leurs hypothèses urbanistiques convergeaient avec les préoccupations fondamentales des habitants des Bas Heurts. C’est à dire urbaniser raisonnablement en incluant des logements sociaux, sauvegarder leur quartier, maintenir sur place ses habitants qui le souhaiteraient et ne démolir aucune maison habitée.
Finalement, le projet alternatif élaboré par les Etudiants de l’ENSAPLV fut jugé hautement convaincant, puisque la Commission d’Enquête Publique sur la ZAC du Clos aux Biches a émis un avis défavorable unanime, à la demande de DUP (Déclaration d’Utilité Publique) de la commune, le 06 avril 2007.
Malgré les absences du Maire et de son premier Adjoint, alors qu’ils étaient invités [3], une conférence organisée par l’ADIHBH-V le 03 février 2007, eut un très grand succès (Cliquer sur : Le contre projet des Etudiants Architectes – Conférence du 04/02/2007).
À la lumière de ce que nous percevons aujourd’hui, les étudiants architectes et l’ADIHBH -V avaient raison avant l’heure. Comme quoi, le Maire devrait nous remercier aujourd’hui d’avoir fait capoter son affaire.
Mais attention, encore aujourd’hui un danger persiste sur les Bas-Heurts !...
Comme nous l’évoquions précédemment, il semblerait aujourd’hui que le projet Grand Ouest présenté fasse l’objet d’une meilleure intégration des différents quartiers de la ville, ce qui est une avancée positive qui doit être signalée.
Toutefois, notons qu’il y a toujours une contradiction flagrante entre d’une part, la volonté de préserver l’environnement et l’objectif affiché dans le rapport de présentation et le PADD (Projet d'Aménagement et de Développement Durable) d’une insertion harmonieuse des nouvelles constructions prévues sur le secteur du Clos aux Biches et, d’autre part, l’opération d’aménagement de grande ampleur de 1500 logements, projetée par la municipalité dans ce secteur.
C’est du reste ce qu’a reconnu le commissaire enquêteur lors de l’enquête sur le PLU (Plan Local d’Urbanisme), en énonçant en septembre 2011 dans ses conclusions, que le projet du Clos aux Biches « ne peut pas raisonnablement […] s’insérer harmonieusement dans son environnement, aussi bien bâti qu’humain : il n’est pas possible de construire 1500 logements (plus les équipements) dans le quartier des Bas-Heurts sans démolir le bâti existant et donc sans chasser de chez elles 55 familles. Par ailleurs, créer un ensemble de cette densité dans un quartier périphérique de la commune, sans transition avec le quartier pavillonnaire de Bry-sur-Marne (94), situé de l’autre côté de la rue des Aulnettes, en limite communale, ce n’est pas faire un aménagement « bien intégré » comme le souhaite le PADD ».
Commentaire
Malgré les avancées positives mentionnées précédemment sur le projet Grand Ouest, le danger d’une éradication du quartier des Bas-Heurts subsiste toujours. En effet, l’approche urbaine du secteur du Clos aux Biches relevée dans l’appel d’offre du 18 juillet 2011 précise : « Aucune des constructions ne présente de qualité remarquable, aussi leur démolition doit être envisagée ». Ce constat dicté par la municipalité, avant même la réalisation d’une étude pré-opérationnelle, objet du marché, est révoltant Il confirme, mais nous le savions déjà, que Michel Pajon a de la suite dans les idées. Outre le caractère outrancier de cette optique urbaine, sa dimension politiquement scandaleuse, antidémocratique, mais également son inanité urbaine et architecturale si cette option se confirmait, ne pourrait être traitée que par le mépris des Noiséens.
Dans le cas de ce nouveau projet d’aménagement du quartier des Bas Heurts, si le résultat de la démarche municipale qui relèverait d’une doctrine totalement obsolète, s’identifiait encore une fois à un simulacre, nous aurions la démonstration évidente que certains Cabinets d’Architectes sont des instruments dociles du pouvoir politique ou les exécutants serviles des opérateurs immobiliers. Malheureusement, cette image assez négative n’est pas, admettons-le, totalement dénuée de fondement, si nous nous rappelons la piètre démonstration réalisée par un Cabinet d’Architecture prestataire de la SEM Socaren et dont nous tairons le nom, lors d’une réunion publique sur le lancement de la ZAC du Clos aux Biches, en octobre 2007.
Ceci étant, depuis une quarantaine d’années dans tous les pays d’Europe et plus particulièrement en France, où l’on a subi avec une violence particulière, les méfaits de la table rase, le bilan est lourd. Il est acquis aujourd’hui, en tous cas dans les Ecoles d’Architecture, chez les Urbanistes, les Géographes urbains et les Historiens de la ville, que cette méthode a fait lamentablement faillite. Outre les dégâts humains considérables que cette approche de la « Tabula rasa » a provoqué partout où elle a prévalu, elle a systématiquement abouti à des désastres urbanistiques majeurs, dont les conséquences se font sentir pendant des dizaines d’années, si toutefois elles peuvent jamais être résorbées un jour.
À moins de considérer l’éradication totale du quartier des Bas-Heurts et son cortège de profonds traumatismes comme le moyen le plus sûr et le plus efficient de régénérer les tissus urbains et sociaux de Noisy-le-Grand, il convient désormais d’abandonner ce mythe destructeur pour aborder la question en des termes tout à fait nouveaux, et de démontrer la pertinence d’une contre méthode de projet urbain.
L’ADIHBH-V y contribuera, à plus forte raison quand des efforts déployés par de jeunes architectes innovants, viendront s’ajouter à ceux des habitants des quartiers pour sauvegarder leur cadre de vie, qui est aussi leur passé, leur histoire et le futur de ce quartier aujourd’hui menacé de destruction.
Ces architectes sont des citoyens conscients de leurs responsabilités particulières dans le domaine de l’aménagement urbain et de l’espace habité. Leur capacité d’expertise est considérable.
Elle doit être utilisée pour éclairer des situations conflictuelles éventuellement prévisibles, les rendre plus intelligibles et prévenir les tragédies humaines et les désastres urbains qui émaillent régulièrement la vie de Noisy-le-Grand.
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[*]- ENSAPLV-Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Paris - La Villette.
[1]- Depuis, cet appel d’offre a été jugé infructueux, mais nous n’en connaissons pas précisément la raison. Quoi qu’il en soit, nous savons que le projet est dans les cartons.
[2]- Epannelage : Le mot « épannelage » est utilisé pour décrire un étagement progressif des hauteurs d'immeubles. Par exemple, entre le quartier pavillonnaire déjà construit de La Garenne à Bry-sur-Marne, et un immeuble de grande hauteur (disons 14 mètres) à construire en cœur d’îlot sur le quartier des Bas-Heurts à Noisy-le-Grand. L'épannelage consisterait à définir une zone d'immeubles de hauteurs intermédiaires, au motif que le résultat serait plus ou moins contraignant pour les habitants et plus esthétique.
[3]- Si Michel Pajon était absent à cette conférence, il n’a pu éviter de se caractériser dès le 05 février 2007, en adressant un courrier de désapprobation à Bertrand Lemoine, Directeur de l’ENSAPLV avec copie à Renaud Donnadieu de Vabres, Ministre de la Culture et de la Communication. Extrait : «…Je m’étonne que des Etudiants d’un établissement public, sous tutelle du Ministère de la Culture et de la Communication, puissent se prévaloir de leur appartenance à votre établissement pour présenter un contre-projet et se faire le relais, par la même occasion, d’une démarche d’une Association qui, en l’espèce, s’avère avant tout politique et électoraliste… » Nous en parlons encore, ce fut un bon moment. (Bertrand Lemoine est aujourd’hui Directeur de l’Atelier International du Grand Paris, nous devrions le revoir).
Michel Miersman, lui aussi à cette occasion s’était fendu d’une longue missive dès le 04 février 2007, à l’attention d’Alain Cassé, Président de l’ADIHBH-V. Extrait : «…Je n’ai pas assisté à cette réunion pour deux raisons essentielles, d’une part toute initiative de réunion publique dans le cadre d’une Enquête Publique est du ressort du Commissaire Enquêteur seul, et d’autre part pour ce que j’ai lu dans le Parisien de ce matin, information venant forcement de votre association, il ne s’agit pas d’un « contre projet » à la ZAC du Clos aux Biches présenté par ma municipalité, mais d’un autre projet »…… « vous proposez de construire les logements en quantité importante ailleurs et vous ne défendez au final que votre intérêt particulier…. »
Ainsi, s’exprime la démocratie participative de Noisy-le-Grand lorsque les citoyens ne récitent pas le même catéchisme que les élus Socialistes. La démarche de l’ADIHBH-V serait politique et électoraliste ? Les habitants des Bas-Heurts défendraient leurs intérêts particuliers et non l’intérêt général (chasse gardée des élus Socialistes) ? Nous serions des nantis et des égoïstes ?
Toutefois, la réalité s’est imposée à la Commission d’Enquête qui, elle, par la suite, a été stigmatisée dans un Communiqué de Presse du Maire le 11 septembre 2007 : « Michel Pajon déplore également les raisonnements approximatifs développés par la Commission d’Enquête qui l’on conduite à commettre, dans son analyse, un certain nombre d’erreurs d’appréciation ».
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