Démocratie locale à Noisy le Grand ? Récit d'un incident lors du dernier conseil municipal...
INCIDENT ABSURDE
AU CŒUR DE NOTRE
DÉMOCRATIE LOCALE
À NOISY-LE-GRAND.
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Juste avant la trêve des confiseurs, malgré de nombreux absents pour cause d’incidents sur la ligne du RER A (un de plus) le dernier Conseil municipal du jeudi 19 décembre avait bien débuté.
Mais c’était sans compter sur le moment où une personne de l’assistance, se disant photographe professionnel indépendant s’est mise, sans troubler la sérénité des débats, à photographier la séance du Conseil municipal.
À ce moment là, le Maire, usant (ou abusant de son pouvoir de police de l’Assemblée), a apostrophé l’impétrant en lui mentionnant qu’il était interdit de photographier sans son autorisation préalable.
Mais en fait, interdit sur quoi, au nom de quoi, sur la base de quel règlement intérieur, sur quelle base juridique ?
Le photographe, connaissant parfaitement ses prérogatives a précisé le droit attaché à sa fonction, poussant même son ardeur jusqu’à préciser la jurisprudence de l’arrêt de la Cour Administrative d’Appel de Bordeaux, en date du 24 juin 2003.
Il était évident que nous allions au clash.
Le Président de l’ADIHBH-V, connaissant trop bien les conflits du même type avec des blogueurs qui émaillent régulièrement les séances des Conseil Municipaux sur le plan national depuis les années 2005 (période où ont été créés de nombreux blogs citoyens), sentait venir l’incident. Cela n’a pas loupé !
Notre « preneur d’images », refusant toujours d’obtempérer après une interruption de séance d’une vingtaine de minutes, s’est vu expulser dans le calme, par ….les hommes de la Brigade Anti-Criminalité (BAC). Excuser du peu !
La position de l’ADIHBH-V
Ici, nous n’étions pas ici dans un cas « de trouble à la sérénité des débats » dont le Maire est le garant. Pas de Femens qui s’exhibent, pas de flashs du photographe, pas de déplacements incessants dans les travées, pas de bruits,…
En l’espèce, les Conseillers Municipaux qui arrivaient en retard, causaient beaucoup plus de perturbations !
Pour interdire la captation d’images, le Maire a invoqué une interdiction de photographier sans autorisation préalable. Ceci étant, l’examen attentif du règlement intérieur du Conseil Municipal adopté le 10 juillet 2014, ne mentionne rien sur ce sujet (Cliquer sur : Réglement intérieur du CM).
Il faudrait donc sérieusement se poser la question d’un éventuel « abus de pouvoir caractérisé» de l’Edile ? Face à un mauvais coucheur, le Maire pourrait être parfaitement attaquable en justice ?
Dans ce cas, la décision d’interdiction du Maire pourrait être jugée illégale.
Ce nouvel incident du 19 décembre 2014, nécessite de rappeler à nos élus de Noisy-le-Grand, quelle que soit leur hiérarchie protocolaire, certaines notions de droits concernant les photographies, vidéos ou enregistrements audio captés lors des séances d'un Conseil Municipal, mais aussi lors de toute manifestation publique.
En fait, une séance du Conseil municipal étant le cœur de notre démocratie locale, le droit à l'image de l’élu n'est pas opposable lorsqu'il agit dans le cadre de ses fonctions publiques. Il peut s'agir d'une séance de Conseil Municipal, d'une allocution évènementielle, d'une cérémonie commémorative. Pour ce qui concerne le public, le droit à l'image n'est pas non plus opposable puisque par définition, une telle séance du Conseil Municipal est publique, de surcroît dans un lieu public. Par contre, il est préférable de faire un plan de masse de la foule présente sans se focaliser sur telle ou telle personne.
Par ailleurs, dans un jugement en date du 5 mai 2008, le Tribunal Administratif de Nice a eu l’occasion de préciser que « l’enregistrement audiovisuel ne peut pas être soumis à un régime d'autorisation préalable ».
Le droit et sa jurisprudence
En effet, une séance publique de Conseil Municipal est par définition " publique " sur le plan du Droit, édicté en l'espèce par le Code des Collectivités Territoriales. Les Elus qui y siègent, de surcroît dans un bâtiment public, étant présents dans le cadre de leur mandat électif, leur droit à l'image n'est plus opposable à un tiers pour ce qui concerne la captation.
La position Ministérielle, confirmée au Sénat et confortée par la jurisprudence, autorise tout citoyen à filmer une séance du Conseil Municipal.
Le principe de publicité des séances posé par l'article 2121-18 du code des Collectivités Territoriales qui a conduit le législateur à prévoir la retransmission des séances par les moyens de communication audiovisuelle, fonde le droit des conseillers municipaux comme des membres de l'assistance, à enregistrer les débats et à les diffuser, éventuellement sur un site Internet.
Pour approfondir l’analyse, nous reproduisons ci-après la question écrite n° 05849 de M. Jean-Louis MASSON (Moselle - NI), publiée dans le JO Sénat du 16/10/2008 - page 2057.
M. Jean Louis Masson attire l'attention de Mme la Ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur le cas où une personne qui assiste à un Conseil Municipal a décidé soit de réaliser un enregistrement sonore, soit de filmer la séance du Conseil Municipal. Il lui demande si, compte tenu du caractère public des séances d'un Conseil Municipal, le maire peut légalement s'opposer à l'enregistrement sonore ou à l'enregistrement vidéo des débats, ainsi qu'à leur diffusion ultérieure sur un site Internet.
La réponse du Ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales publiée dans le JO Sénat du 04/12/2008 - page 2435, est édifiante :
Les termes de cette question étant identiques à ceux de la question n° 32335 en date du 14 octobre 2008 posée par Mme la députée Zimmermann, la réponse sera donc la même. En vertu des pouvoirs de police de l'assemblée qu'il tient des dispositions de l'article L. 2121-16 du code général des collectivités territoriales il appartient au maire de prendre les mesures propres à assurer le déroulement normal des séances du conseil municipal. Le principe de publicité des séances posé par l'article L. 2121-18 du même code, qui a conduit le législateur à prévoir la retransmission des séances par les moyens de communication audiovisuelle, fonde le droit des Conseillers Municipaux comme des membres de l'assistance à enregistrer les débats et à les diffuser, éventuellement sur un site internet. Ce droit reconnu par la jurisprudence administrative a conduit les juges à considérer comme illégale l'interdiction par le maire de procéder à un tel enregistrement dès lors que les modalités de l'enregistrement ne sont pas de nature à troubler le bon ordre des travaux de l'assemblée communale (CAA de Bordeaux, 24 juin 2003 n° 99BX01857 ; CE, 2 octobre 1992, Commune de Donneville ; CE, 25 juillet 1980. M. Sandre).
En conclusion, la position Ministérielle, confortée par la jurisprudence, autorise tout citoyen à filmer et à enregistrer une séance du Conseil Municipal.
En conséquence, il serait judicieux que Monsieur le Maire Michel Pajon fasse actualiser très rapidement le règlement intérieur du Conseil Municipal de Noisy-le-Grand.
Pour l’ADIHBH-V la cause est entendue, le débat est clos.
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NB : Depuis plusieurs années, l’ADIHBH-V enregistre les débats en Conseil Municipal, et poste sur son blog http://www.noisy-les-bas-heurts.com l’intégralité ou une partie des délibérations, sans la moindre entrave. Logiquement, il devrait en être de même si demain, nous décidions de réaliser en enregistrement audiovisuel.
Dernière minute : Nous apprenons que, suite à un Recours Gracieux auprès du Préfet de Seine-Saint-Denis, resté sans réponse, le Groupe politique « Noisy Solidaire à Gauche Vraiment », a déposé il y a quelques mois un Recours Contentieux auprès du Tribunal Administratifs de Montreuil, relatif aux manquements du Règlement Intérieur du Conseil Municipal adopté le 10 juillet 2014.
La publicité des débats du Conseil Municipal est à l’ordre du jour.