De la loi Scellier à la loi Duflot...
DU "SCELLIER" AU "DUFLOT",
UNE NOUVELLE NICHE FISCALE
POUR REDUIRE SES IMPÔTS…
En politique, il faut savoir avaler les couleuvres. Ainsi, la Ministre de l’Egalité des Territoires et du Logement, ne rêvait certainement pas d’élaborer une énième niche fiscale pour donner un coup de pouce aux « Français normaux » qui investissent dans l’immobilier locatif, afin d’obtenir un complément de ressource pour leur retraite Ce n’était pas sa clientèle électorale d’EELV, le parti politique qu’elle dirigeait encore récemment.
Si le Gouvernement fait ce geste en direction des investisseurs, c’est qu’il est rattrapé, comme dans d’autres domaines, par la réalité. Pendant la campagne électorale, le Candidat Président a pris l’engagement de construire 500.000 logements par an. Or, avec la crise, la construction de logements tourne au ralenti. Entre janvier et juillet 2012, les mises en chantiers ont reculé de 12,5%. A cause de ces ventes très faibles, le secteur des maisons individuelles aura détruit cette année 14.000 emplois sur 150.000. Cette faible activité est également préoccupante pour l’économie française dans son ensemble. La construction de logements représente 12% du Produit Intérieur Brut (PIB) et rapporte en impôts 2 milliards d’euros de recettes à l’Etat et 600 millions aux collectivités locales.
Bref, il vaudrait mieux que ce nouveau dispositif de réduction d’impôt soit un succès pour tout le monde, avance Cécile Duflot.
Après le « Scellier » , en avant toute pour « le Duflot »…
Le dispositif de défiscalisation Scellier qui doit disparaître fin 2012, a été créé suite à la crise financière de 2008, dans le but de favoriser l’investissement locatif privé en berne depuis le début de la crise. Cette loi entre en vigueur dès le 1er Janvier 2009 et doit inciter les particuliers à investir dans le locatif et ainsi soutenir la construction de logements.
L’ancienne Présidente des Verts avait tout essayé pour ne pas être celle qui aiderait les investisseurs. Malgré tout, c’est son nom que portera le nouveau dispositif ! Il visera selon la Ministre, à construire 40.000 logements l'année prochaine, alors que le dispositif Scellier ne devrait permettre d'en construire que 30.000 cette année. Il sera plus incitatif fiscalement mais, en contrepartie, il comportera des exigences sociales renforcées. Ainsi, le dispositif Duflot devrait soit disant plus facilement atteindre ses deux principaux objectifs sociaux : réguler le marché de l’immobilier locatif et augmenter le parc locatif dans les grandes agglomérations.
Les contours du « Duflot » :
- Le taux de réduction d’impôts sera entre 17 et 20% de l’investissement sur 9 à 12 ans de location. Les bâtiments fortement écologiques pourraient permettre à l’acquéreur d’obtenir un bonus. L’investissement conservera son plafond de 300.000€.
- Le plafond des loyers devrait se situer 20% en dessous des loyers du marché.
- Les plafonds de ressources des locataires vont être diminués pour offrir plus de logements à la classe moyenne, plus modeste mais qui n’a pas accès à des logements sociaux. Cela offrira donc un intermédiaire entre les logements sociaux et les parcs privés classiques. Les foyers avec des revenus inférieurs à 2,5 fois le SMIC seront éligibles à l’investissement « Duflot ».
- On ne connaît pas encore les conditions pour un éventuel droit de louer à des descendants. Ces détails seront précisés ultérieurement.
- A l’image du Scellier, ce nouvel avantage sera soumis au plafonnement des niches fiscales, mais passe de 18.000€ + 4% des revenus en 2012 à 10.000€ en 2013. Les conditions d’éligibilité sont donc plus contraignantes qu’avec l’investissement en Scellier 2012.
- Les zones concernées par le « Duflot » seront moins nombreuses qu’avec le «Scellier », afin de concentrer la construction de nouveaux logements, là où sont les besoins. Si aucun besoin n'existe dans une zone, le dispositif ne sera pas accessible. C’était l’un des points les plus critiqués du Scellier.
Les mesures du Gouvernement Sarkozy étant tenues pour responsables de cette chute de constructions, la Ministre de l’Egalité des Territoires et du Logement a proposé son nouveau dispositif pour relancer une dynamique d’investissement dans le logement. D’autres mesures devraient être mises en place en 2013.
Le « Duflot » ne réglera pas tout !
Le secteur de l’immobilier doute de l’effet de relance du nouveau régime locatif de défiscalisation sur l’immobilier neuf. A peine ébauché, le « Duflot » ne suscite guère l’enthousiasme des professionnels. Ils doutent de l’effet d’entrainement des nouvelles règles sur le marché alors que 2013 s’annonce difficile. Deux craintes sont évoquées :
- Le nouveau mécanisme, qui prévoit 17 à 20% de réduction d’impôt sur le neuf à douze ans, imposera des loyers inférieurs de 20% à la moyenne locale.
- Le nouveau régime intégrerait la règle de plafonnement des avantages fiscaux à 10.000 € par ménage. De quoi limiter les rendements attendus.
Pour les promoteurs, Guy Nafilyan, patron du promoteur Kaufman et Broad, juge que le plan d'ensemble du Gouvernement pour le logement n'est pas clair. Concernant le dispositif Duflot d’investissement locatif, il a estimé que ces détails ne sont pas suffisamment précis pour voir quel en sera l'impact. François Payelle, Président de la Fédération des Promoteurs Immobiliers (FPI), estime que l'évolution de la fiscalité relative aux ventes de terrains constructibles devrait contribuer à développer l'offre foncière. Par ailleurs, il note que les incitations en faveur des particuliers investisseurs doivent permettre de recréer une offre de loyers intermédiaires et d'inverser les tendances très préoccupantes des indicateurs d'activité, sous réserve bien sûr que les détails du dispositif ne le rendent pas inopérant.
Roger Bélier, Président du Syndicat National des Aménageurs Lotisseurs (SNAL), juge quant à lui que les propositions du Gouvernement ne sont pas suffisantes pour relancer le secteur. Il était indispensable de créer un choc d'offre sur le foncier et d'inciter les propriétaires à mettre sur le marché leur terrain.
La Fédération Française du Bâtiment (FFB) s’est félicitée du maintien de la TVA à taux réduit à 7% sur les travaux de rénovation et accueille positivement le nouveau dispositif « Duflot » en faveur de l'investissement locatif privé, qui parait offrir un bon équilibre entre contraintes sociales et rendement. Elle s'interroge toutefois, sur les effets du nichage de la réduction d'impôts et du zonage retenu.
Pour les juristes, Jean-Dominique Dellanoy, avocat-associé du Cabinet Conseil Fidal, interrogé par l'AFP, a expliqué que l'objectif de 40 000 ventes par les promoteurs en 2013 pour des logements intermédiaires est illusoire vu les faibles conditions faites aux investisseurs dans le cadre du nouveau dispositif « Duflot ».
Commentaire
Les mesures du Gouvernement Sarkozy étant tenues pour responsables d’une certaine chute de constructions ces dernières années, la Ministre de l’Egalité des Territoires et du Logement a proposé un énième dispositif pour relancer une dynamique d’investissement dans le logement.
Mais c’est encore une « vieille lune ». En effet, l’Etat Français a mis en place depuis 1984 plusieurs dispositifs pour faciliter et encadrer les investissements locatifs, qui ont tous subi de nombreuses variations. Pour mémoire, rappelons simplement les dispositifs : Méhaignerie (1984-1997), Périsol (1996-1999), Besson (1999-2002), De Robien (2003-2006), Scellier (2009-2012). A l’arrivée à échéance, le bilan était contrasté entre le cout important pour l’Etat, et les problèmes d’efficacité des dispositifs dans certains cas. 28 ans après, c’est toujours la crise du logement, cherchez l’erreur !
Maintenant, parlons du rendement pour un investisseur particulier. Il faut savoir aujourd’hui, que le rendement d’un bien immobilier locatif se situe entre 4,5 et 5%, avant impôt ; 3,5% après impôt. Vous me direz, oui, mais vous bénéficiez de la plus value immobilière ! Certes, mais il fallait attendre 15 ans, avant d’être totalement exonéré de la plus value, lors de la revente du bien. Depuis le début de l’année, la réforme Fillon est passée par là, et a porté ce délai à 30 ans !!!...
De plus, dans le cadre de la future Loi sur le logement, ce Gouvernement étudie l’éventualité d’une inversion de la fiscalité sur les plus-values foncières, c'est-à-dire une croissance de la taxation avec le temps de détention, a commenté la Ministre. Il n'est pas impossible qu'elle soit dans le projet de Loi de Finances 2013.
Finalement, avec les déplafonnements successifs du livret A (le produit d’épargne préféré des Français), et une éventuelle remontée des taux d’intérêts pour cause d’inflation, on ne peut pas exclure une concurrence « de plus en plus frontale » avec un transfert des flux d’épargne au profit du livret A, puisque le plafond des loyers très bas risque de baisser la rentabilité de l’investissement locatif « Duflot ».
En tant que particulier, si vous souhaitez investir demain dans l’immobilier défiscalisant, ne vous lancez pas dans l’achat d’un bien locatif de manière hasardeuse. Il est important de bien étudier chaque critère de l’investissement et d’être bien renseigné sur la localisation du bien. Quoi qu’il en soit, les particuliers en quête de placement financier ne doivent pas se faire d'illusions, le dispositif fiscal qui remplacera le Scellier début 2013 ne sera pas aussi intéressant. Et il ne consistera pas en une réduction de l'impôt sur le revenu. Cela suffira-t-il pour relancer la construction ?
Depuis de nombreuses années, c'est la quadrature du cercle.
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Contribution bibliographique :
- Le FIGARO, 19/09/2012, Jean-Yves Guérin,
- Le MONITEUR.fr, 19/09/2012, Source AFP,
- LOCALTIS.info, 19/09/2012,
- Le MONITEUR.fr, 01/10/2012, Laurence Francqueville
- Le REVENU, n° :1194, semaine du 28/09 au 04/10/2012
- AGORA.Finances, www.agorafinances.fr